Carnet de voyage
Indonésie

Il n’y a plus de saisons, ma bonne dame. Dès le mois de novembre, fleurissent partout les décorations de Noël. Les rues scintillent, les magasins se parent de guirlandes et de rubans… et au centre de ces décorations, trônent les incontournables sapins. Non, il n’y a plus de saisons et d’ailleurs, en mer, c’est Noël toute l’année. En témoignent de véritables forêts miniatures composées de timides et ravissants petits sapins colorés. Vous passez à leur proximité et en une fraction de seconde, leurs jolis panaches coniques se sont rétractés.

Un drôle de ver

Nous faisons bien entendu allusion aux spirobranches, et plus précisément au Spirobranchus Giganteus, également surnommé « ver-arbre de Noël ». Cet animal, de la famille des Serpulidae, est en réalité un petit ver marin, dont la taille avoisine les cinq à six centimètres. Il vit dans les zones tropicales, en symbiose avec certaines espèces de corail, qui lui offrent le gîte. En échange, le Spirobranchus Giganteus offre sa protection : son contact est irritant, tandis que ses mouvements permettent à l’eau de mieux circuler et donc, aux aliments de mieux parvenir aux polypes.

Du fait de son mode de vie, le spirobranche est cantonné aux zones peu profondes, et rentre donc dans la catégories des espèces benthiques. Sa morphologie est étrange : il est doté d’un tube calcaire solidement ancré sur le récif. De ce cylindre rigide émerge une paire de tentacules qui se déploient en spirale et forment des cônes. Ces derniers sont incroyablement colorés : rouge, orange, jaune, blanc, bleu, violet, rose… d’un individu à l’autre, leur palette est sans fin, de même que leur rôle est diversifié.

Nous l’avons vu, les tentacules du spirobranche lui assurent une forme de protection contre les prédateurs qui viendraient s’y frotter. Ils endossent également la responsabilité de le faire respirer (ce sont des branchies) et de l’alimenter. Agissant comme des filets de pêche lorsqu’ils sont déployés, ils filtrent et capturent les particules en suspension dans l’eau, afin de permettre au ver de se sustenter.

En somme, le panache coloré du ver-arbre de Noël n’est pas là seulement pour le décorer. Toute sa survie dépend de ces appendices, que le Spirobranchus Giganteus doit donc impérativement protéger. C’est pourquoi un simple mouvement de palmes à sa proximité suffit à ce que votre arbre de Noël sous-marin disparaisse… pour mieux revenir, une fois le danger écarté. Ce subterfuge permet au spirobranche une étonnante longévité, puisqu’il peut vivre près d’une quarantaine d’années.

Un ver prestidigitateur aux allures de sapin miniature, c’est aussi ça, la magie de Noël. Une magie accessible aux seuls amateurs de plongée !